Opposabilité à l’assureur, sauf fraude de l’assuré, des résultats d’une expertise judiciaire à laquelle il n’a pas été partie — Karila

Opposabilité à l’assureur, sauf fraude de l’assuré, des résultats d’une expertise judiciaire à laquelle il n’a pas été partie

Assurance décennale ; Expertise ; Opposabilité à l’assureur du responsable ; Connaissance des résultats de l’expertise par l’assureur ; Possibilité d’en discuter les conclusions ; Opposabilité, sauf fraude à son égard

RGDA N° 11 novembre 2016 p. 528


Cass. 3e civ., 29 sept. 2016, n° 15-16342, Bull.

Résumé : Viole l’article 16 du Code de procédure civile la cour qui, pour dire que le rapport d’expertise n’est pas opposable à l’assureur, retient que celui-ci n’a pas été appelé à la procédure de référé engagée à l’encontre de l’assuré, qu’ainsi le rapport d’expertise judiciaire à laquelle la partie à qui on l’oppose n’a pas été appelée qui, certes, a été soumis à la libre discussion des parties durant les procédures de première instance et d’appel, ne peut à soi seul constituer la preuve des manquements de l’assuré à ses obligations en qualité de constructeur alors que l’assureur, qui, en connaissance des résultats de l’expertise dont le but est d’établir la réalité et l’étendue de la responsabilité de son assuré qu’il garantit, a eu la possibilité d’en discuter les conclusions, ne peut, sauf s’il y a eu fraude à son encontre, soutenir qu’elle lui est inopposable.

Extrait :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Metz, 9 décembre 2014), que M. et Mme X. ont confié à la société Archica, en qualité de maître d’œuvre et de constructeur, assurée auprès de la caisse d’assurance mutuelle du bâtiment et des travaux publics (CAMBTP), la construction de trois pavillons mitoyens et d’une maison d’habitation ; que le chantier a été interrompu, la société Archica ayant été placée en liquidation judiciaire ; que M. et Mme X. ont, après expertise, assigné la CAMBTP en indemnisation de leurs préjudices ;

Mais sur les deuxième et troisième moyens, réunis :

Vu l’article 16 du Code de procédure civile ;

Attendu que, pour dire que le rapport d’expertise n’est pas opposable à la CAMBTP, l’arrêt retient que l’assureur n’a pas été appelé à la procédure de référé engagée par M. et Mme X. à l’encontre de la société Archica et de l’administrateur judiciaire, qu’ainsi le rapport d’expertise judiciaire, à laquelle la partie à qui on l’oppose n’a pas été appelée, qui, certes, a été soumis à la libre discussion des parties durant les procédures de première instance et d’appel, ne peut à soi seul constituer la preuve des manquements contractuels du maître d’œuvre à ses obligations en qualité de constructeur ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’assureur, qui, en connaissance des résultats de l’expertise dont le but est d’établir la réalité et l’étendue de la responsabilité de son assuré qu’il garantit, a eu la possibilité d’en discuter les conclusions, ne peut, sauf s’il y a eu fraude à son encontre, soutenir qu’elle lui est inopposable, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE… ;

Cass. 3e civ., 29 sept. 2016, no 15-16342, F–PB


Sur l’ensemble de la question, voir :

– « La valeur probante de l’expertise en assurance » par Hourdeau-Bodin S., RGDA avr. 2016, n° 113g3, p. 206 ;

– Lamy Assurances 2016, chap. Assurance de responsabilité décennale par Karila J.-P., n° 3697 à 3699.


1. La diversité des décisions rendues sur la question de l’opposabilité d’un rapport d’expertise à une partie qui n’a pas été appelée en la cause, qu’il s’agisse de l’assuré ou de l’assureur, peut conduire à la perplexité.

Perplexité trouvant parfois sa source dans l’opposition qui a existé, et qui existe peut-être encore concernant certains aspects de la question entre la 2e et la 3e chambre civile, mais tenant aussi, à l’occasion, à raison de la confusion de cette question avec celle de la nullité du rapport d’expertise, questions toutes deux traversées par le principe de la contradiction.

À telle enseigne, qu’un auteur spécialiste de la procédure s’est déclaré « désemparé par la diversité des solutions jurisprudentielles », et a précisé qu’il avait en conséquence laissé « en jachère la question de l’application du principe du contradictoire » pendant un certain temps (Loïs Raschel in Procédures 2013, n° 5).

2. L’arrêt rapporté manifeste la volonté de la Cour de cassation de rappeler – la solution ayant déjà été énoncée par les arrêts antérieurs dont il sera fait état ci-après – que le principe du contradictoire est respecté à l’égard de l’assureur, non appelé à la procédure de référé ayant conduit à désignation de l’expert, si ledit assureur a été en mesure de discuter des résultats de l’expertise en ce qui concerne notamment les manquements de l’assuré qu’il garantit, de sorte qu’il ne peut prétendre à l’inopposabilité dudit rapport, lequel peut constituer, à lui seul, à son égard, la preuve des manquements de l’assuré qu’il garantit.

3. La question que l’on peut néanmoins, légitimement se poser, est celle de savoir si pour autant la solution consacrée est toujours opportune et justifiée.

Certes, la solution est insusceptible d’application en cas de fraude de l’assuré, mais en l’absence de fraude de celui-ci, les résultats d’une expertise judiciaire peuvent être faussés pour le moins influencés par certaines circonstances ou irrégularités de l’expertise à l’égard de l’assuré, sans pour autant que l’assureur puisse les invoquer pour des raisons qui seront précisées ci-après.

4. Dans ce contexte et dans une perspective didactique, nous nous proposons de rappeler la ou les questions ci-avant abordées tant au regard de l’assureur que de l’assuré avant de livrer certaines réflexions relativement aux conséquences attachées à l’impossibilité pour l’assureur d’invoquer la nullité d’un rapport d’expertise qui lui est cependant – sauf fraude – opposable.

Le principe de l’inopposabilité des résultats d’une expertise judiciaire à laquelle l’assuré n’a pas été partie

5. Les opérations d’expertise ordonnées en référé ou par le juge du fond, ne sont opposables à l’assuré que s’il a été partie ou représenté au procès dont s’agit, son abstention à participer aux opérations d’expertise n’étant pas une cause d’inopposabilité de celle-ci, dès lors qu’il a été régulièrement convoqué dans les conditions et formes prévues par l’article 160 du Code de procédure civile.

Le principe de l’inopposabilité des opérations d’expertise ainsi édicté, trouve son fondement dans l’article 16 du Code de procédure civile qui énonce que le juge doit, en toute circonstance, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction (voir notamment Cass. 3e civ., 26 janv. 2010, n° 06-19091 – Cass. 3e civ., 27 févr. 2013, n° 12-13625).

La relativité du principe – les conditions de son éviction

6. Le droit positif admet néanmoins qu’un rapport d’expertise judiciaire auquel une personne n’a pas été partie, peut être retenu à son encontre à la triple condition que :

1. le rapport d’expertise soit pris en considération non comme tel mais comme simple renseignement ;

2. le contenu du rapport d’expertise ait été débattu contradictoirement par la personne concernée dans le cadre du procès statuant sur sa responsabilité ;

3. le juge ne se fonde pas uniquement sur une expertise (Cass. 3e civ., 23 avr. 1992, n° 90-14071 : Bull. civ. III, n° 140 – Cass. 3e civ., 9 juin 1993, n° 91-16479 : Bull. civ. III, n° 84 – Cass. 2e civ., 1er juin 1994, n° 92-16990 : Bull. civ. II, n° 146 – Cass. 2e civ., 18 juin 1997, n° 95-20959 : Bull. civ. II, n° 197 – Cass. 3e civ., 5 déc. 2006, n° 05-20356 – Cass. 3e civ., 27 mai 2010, n° 09-12693 : RGDA 2010, p. 741, note Karila J.-P. et L.).

L’illustration du principe de l’opposabilité du rapport d’expertise sauf le cas de fraude dans le rapport assuré/assureur d’une part et assureur/victime-tiers lésé d’autre part

7. La relativité du principe de l’inopposabilité est illustrée dans certaines circonstances par le principe inverse de l’opposabilité du rapport d’expertise dont l’application est retenue, sauf fraude de l’assuré, et ce tant dans les rapports de l’assuré avec l’assureur que dans ceux de celui-ci à l’égard de la victime-tiers lésé.

Étant observé que les décisions rendues dans ces deux domaines énoncent le principe selon lequel « la décision judiciaire, qui condamne un assuré en raison de sa responsabilité, constitue pour l’assureur, qui garantit celle-ci dans ses rapports avec la victime [précision qui n’est pas toujours donnée dans les procès opposants assureur et assuré] la réalisation, tant dans son principe que dans son étendue du risque couvert par l’assureur ».

Étant observé encore que dans tous les cas, les décisions dont s’agit soulignent que l’assureur doit avoir été – en principe – appelé à la procédure « en temps où il peut encore discuter les conclusions de l’expert » d’une part et le sont soit au visa de l’article L. 113-5 du Code des assurances et de l’article 16 du Code de procédure civile, soit sans visa d’un quelconque texte d’autre part.

7.1. Dans les rapports assuré/assureur

Depuis un arrêt du 8 octobre 1996 (Cass. 1re civ., 8 oct. 1996, n° 94-10434 : Resp. civ. et assur. 1996, com. n° 407), rendu au visa de l’article L. 113-5 du Code des assurances, la jurisprudence admet l’opposabilité du rapport d’expertise à l’assureur, sauf fraude de l’assuré.

La solution a été réaffirmée :

– par la 1re chambre civile dans deux arrêts du 4 juin 1991 (Cass. 1re civ., 4 juin 1991, n° 88-17702 et n° 88-16373 : Bull. civ. III, n° 182) qui ne comportent curieusement aucun visa de texte spécifique ;

– puis par la 3e chambre civile dans un arrêt du 19 juin 1991 (Cass. 3e civ., 19 juin 1991, n° 88-16599 : Bull. civ. III, n° 186) rendu au visa de l’article L. 113-5 du Code des assurances.

Les arrêts dont s’agit énonçant et reproduisant le principe ci-avant cité selon lequel la décision judiciaire qui condamne un assuré en raison de sa responsabilité constitue pour l’assureur qui garantit celle-ci, la réalisation tant dans son principe que dans son étendue du risque couvert par l’assureur.

Tandis que la 2e chambre civile, dans un arrêt du 1er juillet 2010 (Cass. 2e civ., 1er juill. 2010, n° 09-10590 : Bull. civ. II, n° 129) a énoncé, en ce qui la concerne, au visa de l’article L. 113-5 du Code des assurances et de l’article 16 du Code de procédure civile que « l’assureur qui, en connaissance des résultats de l’expertise dont le but est d’établir la réalité et l’étendue de la responsabilité de son assuré qu’il garantit, a eu la possibilité d’en discuter les conclusions, ne peut, sauf s’il y a eu fraude à son encontre, soutenir qu’elle lui est inopposable ».

La formulation de ce dernier arrêt étant identique à celle employée dans l’arrêt rapporté du 29 septembre 2016 statuant à l’occasion des rapports assureur/victime-tiers lésé.

7. 2. Dans les rapports assureur/victime-tiers lésé

Par arrêt du 4 novembre 1992 (Cass. 2e civ., 4 nov. 1992, n° 90-19807 : Bull. civ. II, n° 258), la 2echambre civile avait déjà, statuant dans les rapports assureur/victime-tiers lésé, adopté la formule ci-avant évoquée de l’un des arrêts rendus par la 1re chambre civile selon laquelle « la décision judiciaire, qui condamne un assuré en raison de sa responsabilité, constitue pour l’assureur, qui a garanti celle-ci, dans ses rapports avec la victime, la réalisation, tant dans son principe que dans son étendue, du risque couvert et que l’assureur, appelé à la procédure en un temps où il peut encore discuter les conclusions de l’expert, n’est pas fondé, sauf en cas de fraude de l’assuré, à soutenir qu’elle lui est inopposable » la solution ayant été réitérée par un arrêt du 20 décembre 1993 de la 1re chambre civile (Cass. 1re civ., 20 déc. 1993, n° 91-18379).

L’arrêt rapporté reproduit quant à lui très exactement la formulation d’un arrêt du 19 novembre 2009 (Cass. 2e civ., n° 08-19824 : Bull. civ. II, n° 273 – Groutel H., Resp. civ. et assur. 2010, comm. n° 155) qui avait alors déjà énoncé « l’assureur qui, en connaissance des résultats de l’expertise dont le but est d’établir la réalité et l’étendue de la responsabilité de son assuré qu’il garantit, a eu la possibilité d’en discuter les conclusions, ne peut, sauf s’il y a eu fraude à son encontre, soutenir qu’elle lui est inopposable », formulation utilisée par la suite le 1er juillet 2010 dans les rapports assureur/assuré (supra 7.1).

La solution a été réaffirmée par un arrêt du 2 mars 2011 (Cass. 3e civ., 2 mars 2011, n° 09-72901, 10-10317).

Expertise judiciaire et expertise privée/les arrêts de la chambre mixte du 28 septembre 2012

8. (Voir Proc. 2012, comm. n° 320 et 321, Perrot R. ; « Expertise et contradictoire, vers une cohérence procédurale ? », JCP G 2012, n° 46, 1200, Amrani-Mekki S. ; « Expertise et contradictoire : le jour se lève… un peu ! », Gaz. Pal. 2012, jur., p. 25, Raschel L. ; RGDA 2013, p. 227, Schulz R.).

Aux termes du premier arrêt du 28 septembre 2012 (Cass. ch. mixte, 28 sept. 2012, n° 11-11381 : Bull. civ. ch. mixte, n° 1) la Haute juridiction a posé le principe selon lequel les parties à une instance au cours de laquelle une expertise judiciaire a été ordonnée, ne peuvent invoquer l’inopposabilité du rapport d’expertise en raison d’irrégularités affectant le déroulement des opérations d’expertise, lesquelles sont sanctionnées suivant les dispositions de l’article 175 du Code de procédure civile qui renvoient aux règles régissant les nullités des actes de procédure.

Aux termes du second arrêt (Cass. ch. mixte, 28 sept. 2012, n° 11-18710 : Bull. civ. ch. mixte, n° 2) relatif à une expertise privée, la Haute juridiction confirme un principe déjà acquis selon lequel le juge ne peut fonder sa décision exclusivement sur une expertise réalisée à la demande de l’une des parties.

Sur l’irritante question de savoir si le principe de la contradiction est respecté alors même que le juge fonde sa décision uniquement sur le rapport d’expertise judiciaire

9. La Haute juridiction, soit implicitement, soit expressément et à l’inverse de ce qui a été dit ci-dessus (supra 6), valide certaines décisions des juges du fond alors que celles-ci sont fondées exclusivement sur le rapport d’expertise judiciaire auquel l’assureur ou l’assuré n’ont pas été partie, ce qui n’est pas à notre avis, satisfaisant en droit et en fait.

On signalera et on précisera à cette occasion :

– que l’arrêt précité de la 2e chambre civile du 4 novembre 1992 (supra 7.2) a été rendu dans une espèce où le juge du fond s’était fondé uniquement sur le rapport d’expertise judiciaire et dont les opérations n’avaient pas été rendues communes à l’assureur ;

– que l’arrêt précité de la 3e chambre civile du 19 juin 1991 (supra 7.1) a trait à une espèce où le juge du fond s’était fondé exclusivement sur deux rapports d’expertise judiciaire auxquels l’assureur n’avait pas été partie ;

– que l’arrêt précité du 20 décembre 1993 (supra 7.2) de la 1re chambre civile est relatif à une espèce où les juges du fond se sont également fondés exclusivement sur le rapport d’expertise judiciaire auquel l’assureur n’avait pas été partie ;

– que l’arrêt précité du 2 mars 2011 (supra 7.2) a été rendu dans une espèce où ni l’assuré ni l’assureur n’avaient été parties aux opérations d’expertise judiciaire, l’assureur n’ayant eu connaissance du rapport d’expertise que dans le cadre de la procédure au fond ;

– que par arrêt de la 2e chambre civile du 8 septembre 2011 (Cass. 2e civ., 8 sept. 2011, n° 10-19919 : Bull. civ. II, n° 166 ) ainsi que par arrêt de la chambre criminelle du 13 octobre 2011 (Cass. crim., 13 oct. 2011, n° 12-81174 : Bull. crim. n° 255 ; les deux arrêts ayant été commentés à la RGDA 2012, p. 727, note Karila J.-P. et Karila L.), la Cour de cassation a admis – comme dans l’arrêt rapporté – que le juge du fond puisse fonder sa décision exclusivement sur un rapport d’expertise judiciaire, à l’encontre d’une partie qui n’a pas été appelée aux opérations d’expertise dont s’agit ;

– que par arrêt de la 2e chambre civile du 22 novembre 2012 (Cass. 2e civ., 22 nov. 2012, n° 10-26198 et 10-26755) la solution a été réitérée.

La zone d’ombre créée par l’arrêt n° 1 de la chambre mixte du 18 septembre 2012 est de nature à voiler la solution retenue par l’arrêt rapporté

10. Si le second arrêt de la chambre mixte du 28 septembre 2012 a confirmé le principe selon lequel le juge ne peut fonder sa décision exclusivement sur un rapport d’expertise auquel une personne, qu’elle soit l’assurée ou l’assureur, n’a pas été partie, il ne l’a énoncé qu’à propos de l’expertise privée (supra 8) de sorte que l’on aurait pu légitimement penser que le débat restait ouvert en ce qui concernait l’expertise judiciaire dont l’inopposabilité aurait pu être recherchée en dehors de strictes cas de nullité ne serait-ce qu’en vertu du principe du contradictoire, mais il n’en a rien été comme déjà illustré ci-avant.

La combinaison :

– du principe posé par l’arrêt n° 1 du 28 septembre 2012 de la chambre mixte selon lequel les parties ne peuvent invoquer l’inopposabilité d’un rapport d’expertise en raison d’irrégularités affectant le déroulement des opérations d’expertise, la sanction de telles irrégularités étant la nullité du rapport d’expertise,

– et de celui – illustré notamment par l’arrêt rapporté –, selon lequel un rapport d’expertise peut être opposé à l’assureur qui n’y a pas été partie dès lors qu’il en a eu connaissance et qu’il a pu en discuter contradictoirement au cours du procès,

peut conduire dans certaines espèces à des conséquences surprenantes en équité mais aussi en droit puisqu’aussi bien un rapport dont la nullité aurait pu être prononcée à la demande de l’assuré en violation du principe de la contradiction, sera néanmoins opposable à son assureur en vertu du même principe !…

La situation ci-avant imaginée d’un point de vue théorique pourrait avoir été la situation de l’espèce de l’arrêt rapporté puisqu’aussi bien au moment de la désignation de l’expert par ordonnance de référé, l’assuré n’était plus in bonis, l’assignation lui ayant été délivrée alors qu’il était en redressement judiciaire (et en cette qualité) ainsi qu’à l’administrateur judiciaire.

Étant souligné que les arrêts précités des 19 novembre 2009 et 2 mars 2011 (supra 7.2) ont été rendus également dans des espèces où l’assuré n’était plus in bonis et n’avait pas participé aux opérations d’expertise judiciaire.

Étant précisé que la cour de Metz dans son arrêt objet de la cassation prononcée le 29 septembre 2016, avait observé et relevé :

– qu’elle n’était pas en mesure à défaut de production du jugement ouvrant le redressement judiciaire, de déterminer si l’administrateur judiciaire avait une mission de représentation de l’assuré, objet de la procédure collective, ou simplement de l’assister ;

– qu’il ne résultait pas des mentions de l’expertise judiciaire que l’assuré ait été convoqué, présent ou représenté aux opérations d’expertise avec toutefois la précision que le pré-rapport d’expertise avait été adressé au mandataire de justice sans observations de sa part.

Le praticien, qui est l’auteur de la présente note, a constaté comme beaucoup d’autres et avec beaucoup d’autres, qu’un procès se gagne ou se perd au cours des opérations d’expertise et que l’irrégularité des opérations d’une expertise à l’égard des parties qui n’auront pas été présentes ou représentées, conduit sinon toujours ou presque toujours, à des résultats faussés ou injustifiés concernant lesdites parties, l’adage suivant lequel « les absents ont toujours tort » s’illustrant parfaitement en la circonstance.

Aussi, si la solution de l’arrêt rapporté est insusceptible de critique en droit, il reste que dans certains cas elle peut se révéler inopportune et contraire pour le moins à l’équité si ce n’est au bon droit.


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