L’erreur d’implantation conduisant à la nécessité de démolir ne relève pas de la responsabilité décennale en l’absence de désordres matériels affectant l’ouvrage (CA Colmar, 16 novembre 2006) — Karila

L’erreur d’implantation conduisant à la nécessité de démolir ne relève pas de la responsabilité décennale en l’absence de désordres matériels affectant l’ouvrage (CA Colmar, 16 novembre 2006)

Ancien ID : 324

L’erreur d’implantation de l’ouvrage soulève une véritable difficulté juridique lorsqu’il s’agit, comme c’était le cas en l’espèce, d’un pur défaut d’implantation et que l’ouvrage est, sur le plan technique, parfait.

La question posée est la suivante : une telle erreur d’implantation engage-t-elle la responsabilité décennale des constructeurs

À cette question, la Cour de Colmar répond, dans le présent arrêt, par la négative en se fondant sur le fait qu’il n’y aurait alors aucun dommage matériel affectant l’ouvrage et ce alors même que l’erreur d’implantation conduirait à la nécessité de démolir ledit ouvrage.

La Cour a ainsi retenu que :

« Mais attendu qu’il est à ce jour patent (…) que les travaux de construction exécutés par [l’entrepreneur] ont abouti à l’édification d’un ouvrage parfaitement solide et conforme à sa destination contractuelle :

Que la démolition de ce bâtiment n’est imposée que par la nécessité de le construire conformément aux règles d’urbanisme et dans le respect des droits du propriétaire voisin ;

Que l’impossibilité d’utiliser l’ouvrage qui s’avère exclusivement de nature juridique ne s’analyse pas au sens des articles 1792 du Code civil comme une impropriété de destination résultant d’un désordre matériel affectant les travaux de bâtiment ;

Attendu que l’obligation de démolir ne ressortit donc pas à la responsabilité décennale de [l’entrepreneur] ».

Il s’agit d’une solution d’une rare rigueur, le plus souvent, la Cour de cassation exige des juges du fond qu’ils caractérisent ou recherchent en quoi cette erreur d’implantation conduirait à une atteinte à la solidité ou à la destination de l’ouvrage (sur cette question, Droit de la construction : responsabilités et assurances, Litec 2007, n° 330 et s.).

Il n’est pas certain que la solution retenue par la Cour de Colmar soit compatible avec la jurisprudence de la Cour de cassation et résiste au contrôle de légalité en cas de pourvoi formé à son encontre.

Source : CA Colmar, 2ème A, 16 novembre 2006, jurisdata n° 2006-329048

Contra : Caen, 15 janvier 2013, RG n° 11/00621


© – Karila – Laurent Karila et Cyrille Charbonneau 

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