Le groupement d’entreprises est tenu de prendre en charge le coût du préjudice indemnisable qui regroupe tous les travaux nécessaires à la réparation de l’ouvrage (Cass. 3e civ., 20 novembre 2013) — Karila

Le groupement d’entreprises est tenu de prendre en charge le coût du préjudice indemnisable qui regroupe tous les travaux nécessaires à la réparation de l’ouvrage (Cass. 3e civ., 20 novembre 2013)

Encore un exemple du principe du droit du maître d’ouvrage à la réparation intégrale selon lequel tous les travaux nécessaires à laréparation de l’ouvrage, jusqu’à et y compris ceux utile à la réalisation d’une partie d’ouvrage non inclus au devis initial, sont dus au maître d’ouvrage.


« Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 5 septembre 2012), que la société Ciments Calcia (société Calcia), qui exploite une usine de production de ciment et pour les besoins de sa fabrication une carrière d’argile, a confié au groupement momentané d’entreprises composé de la société GTM construction terrassement, mandataire du groupement, devenue Vinci construction terrassement, et de la société Forezienne d’entreprises et de terrassements l’ensemble des études et travaux de découverte et de réaménagement de la carrière afin d’en permettre l’exploitation future et la réalisation d’un ouvrage consistant en un talus drainé par réseau ; que la réception des travaux a eu lieu le 15 décembre 2005 avec des réserves qui ont été levées le 22 décembre 2005 ; qu’en raison de la survenue d’inondations, de coulées de boues et de fortes dégradations de la plate-forme et des talus malgré une première intervention en avril 2006, la société GTM a proposé la mise en place de dispositifs complémentaires ; qu’après expertise, la société Calcia a assigné la société Vinci construction terrassement et la société Forezienne d’entreprises et de terrassements en indemnisation de ses préjudices ;

Attendu que la société Vinci et la société Forezienne font grief à l’arrêt de les condamner solidairement à payer la somme de 282 553, 50 euros, alors, selon le moyen :

1°/ que la réparation d’un dommage doit être à l’exacte mesure du préjudice effectivement subi, de façon que la victime soit replacée dans la situation où elle aurait dû normalement se trouver, sans qu’il n’en résulte pour elle ni perte ni profit ; qu’il s’ensuit que, réserve faite de circonstances très particulières, non caractérisées en l’espèce, telle la conclusion d’un marché à forfait, le maître de l’ouvrage ne peut obtenir à titre de réparation le montant de travaux non prévu dans le marché initial et dont il aurait dû de toute façon supporter le coût si même le constructeur avait parfaitement rempli ses obligations en prévoyant dès l’origine la réalisation de ces travaux complémentaires jugés indispensables à la bonne tenue de l’ouvrage ; qu’en considérant, contrairement à ce qui était soutenu, que le préjudice indemnisable incluait, non point seulement le coût des travaux nécessaires à la réparation de l’ouvrage, mais également le coût des ouvrages complémentaires qui n’avaient pas été prévus dans le marché initial mais n’en étaient pas moins nécessaires à la perfection de l’édifice, cependant que devait être déduit du coût global des travaux, la somme au paiement de laquelle le maître d’ouvrage aurait dû de toute façon faire face si la réalisation des travaux complémentaire avait été prévue dès l’origine, comme elle aurait dû l’être, la cour d’appel viole l’article 1149 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale du dommage ;

2°/ qu’il résulte des constatations mêmes de l’arrêt, d’une part, que la conception technique de l’ouvrage était l’oeuvre de la société Calcia, qui notamment avait mis au point le Cahier des clauses techniques particulières dont les stipulations s’imposaient au groupement d’entreprises constitué des sociétés Forézienne et Vinci, d’autre part, que les désordres observés trouvaient leur origine dans un vice de conception, tenant à l’absence de prévision de dispositifs destinés à ralentir de la vitesse d’écoulement de l’eau et à améliorer la résistance de l’ouvrage à l’érosion superficielle ; qu’il s’en évince nécessairement que la société Calcia avait commis une faute lors de la conception de l’ouvrage qui était en relation de causalité avec le dommage qui s’était produit, ce qui faisait obstacle à ce que les manquements par ailleurs retenus à l’encontre du groupement d’entreprises au titre de son obligation de résultat et de son obligation de conseil fussent considérés comme constituant la cause exclusive du dommage ; qu’en décidant néanmoins que le groupement d’entreprises devait supporter seul l’intégralité du coût des travaux nécessaires à la réparation et à la perfection de l’ouvrage, ensemble l’intégralité des frais annexes, la cour d’appel, qui refuse de tirer les conséquences de ses propres constatations, violant ce faisant l’article 1147 du code civil ;

Mais attendu, d’une part, que la cour d’appel n’ayant pas retenu que la conception technique de l’ouvrage était l’oeuvre de la société Calcia, le moyen manque en fait ;
Attendu, d’autre part, qu’ayant relevé que le groupement d’entreprises estimait que les travaux de reprise complémentaires commandés en juillet 2007 sortaient du champ contractuel initial et auraient dû de toute façon être pris en charge par la société Calcia, la cour d’appel a retenu à bon droit que ce groupement était tenu de prendre en charge le coût du préjudice indemnisable qui regroupe tous les travaux nécessaires à la réparation de l’ouvrage ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ; »



Source : Cass. 3e civ., 20 novembre 2013, 12-29259, 1359