Recours des locateurs entre eux – Le délai décennal ne se compute pas à compter de la réception (Cass. 3e civ. 8 février 2012) — Karila

Recours des locateurs entre eux – Le délai décennal ne se compute pas à compter de la réception (Cass. 3e civ. 8 février 2012)

Dans cet arrêt, la Cour de Cassation se prononce une nouvelle fois sur le recours entre constructeurs, après celui rendu par cette même 3ème chambre civile le 8 juin 2011.

On rappellera en préambule que le résumé de l’arrêt publié énonçait alors : « Les personnes responsables de plein droit des désordres de nature décennale, ne peuvent agir en garantie ou à titre récursoire contre les autres responsables tenus avec elles au même titre, que sur le fondement de la responsabilité de droit commun applicable dans leurs rapports. »

Cet arrêt reprenait une solution constante de la Cour de Cassation (Cass. 3e civ, 14 septembre 2005, n° 04-10241, Bull. n° 164 – ou encore Cass. 1re civ., 14 oct. 1958, Bull. civ. I, n° 428 et 429 ; Cass. 3e civ., 3 juill. 1968, JCP 1969, II, n° 15860, note Soinne ; Cass. 3e civ., 11 oct. 1989, Bull civ. III, n° 190)

Dans cette nouvelle affaire, l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles qui avait dite prescrite l’action en garantie intentée par les architectes -déjà condamnés sur le fondement de la garantie décennale- à l’encontre de son cocontractant bureau d’étude et son assureur pour avoir été introduite plus de dix après la réception est cassé sous le visa des anciens articles 2270 du Code civil et L.110-4 du Code de commerce, au motif que « le recours d’un constructeur contre un autre constructeur ou son assureur n’est pas fondé sur la garantie décennale, mais est de nature contractuelle si ces constructeurs sont contractuellement liés, et de nature quasi délictuelle s’ils ne le sont pas, de sorte que le point de départ du délai de cette action n’est pas la date de réception des ouvrages ».

Pas de subrogation en garantie décennale, d’accord ; la seule responsabilité civile contractuelle ou délictuelle, d’accord ; mais la Cour de cassation n’a pas précisé à compter de quelle date le délai d’action se computait, se contentant de préciser que cette date ne pouvait pas être la réception de l’ouvrage ; ce qui nous donne l’occasion de rappeler :

1.qu’antérieurement à la loi du 17 juin 2008 :

– le délai de prescription de l’action délictuelle de droit commun était de dix ans conformément à l’article 2270-1 ancien du Code civil à compter de la manifestation ou de l’aggravation du dommage ;

– le délai de prescription de l’action contractuelle de droit commun conformément à l’article 2262 du Code civil et de la jurisprudence applicable était de trente ans entre non commerçants et dix ans entre commerçants (L.110-4 CC) à compter de la révélation du dommage ;

– alors que le délai de prescription de l’action contractuelle du maître de l’ouvrage à l’encontre de son locateur d’ouvrage était de dix ans à compter de la réception (Arrêt Botemer : Cass. 3e civ, 16 octobre 2002, n° 01-10330, Bull., n° 205) ;

2. que la loi du 17 juin 2008 réformant la prescription a introduit l’article 1792-4-3, a « instauré/légalisé » un délai de prescription –très vraisemblablement contractuel et délictuel même si le texte ne l’énonce pas- de dix ans pour les actions en responsabilité de droit commun intentées contre les constructeurs et leurs sous-traitants à compter de la réception de l’ouvrage.

Le délai de l’action contractuelle d’un colocateur d’ouvrage (architecte) contre un autre (bet) (tous deux membres d’une équipe de maîtrise d’œuvre) devait donc – sous l’ancien régime- se computer à compter de la « révélation du dommage », la question demeurant de savoir si l’évènement donnant le point de départ était l’apparition des désordres ou l’action engagée à l’encontre des architectes ou encore leur condamnation à indemniser le maître d’ouvrage…

Source : Cass. 3e civ. 8 février 2012, n° 11-11417, 168, Bull. à venir

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