Le Moniteur – Panorama de droit de la construction – Cour de cassation – Premier semestre 2022 — Karila

Le Moniteur – Panorama de droit de la construction – Cour de cassation – Premier semestre 2022

Sélection des décisions les plus instructives rendues par la Cour de Cassation au premier semestre 2022. 

Par Laurent Karila
Avocat associé – Karila, Société d’avocats
Chargé d’enseignement à l’Université de Paris I Panthéon-Sorbonne

La réception partielle par étage est-elle possible ? Les désordres relevant d’une garantie légale peuvent-ils engager la responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs ? Les pénalités de retard prévues dans le contrat de construction de maison individuelle (CCMI) peuvent-elles se cumuler avec d’autres indemnités ? La Cour de cassation a répondu à toutes ces questions, et à bien d’autres, pendant les six premiers mois de l’année

UN OUVRAGE OU UN ELEMENT D’EQUIPEMENT

Les travaux de ravalement associés à la pose d’un enduit qui assure une fonction d’étanchéité participent à la réalisation d’un ouvrage au sens de l’article 1792 du Code civil. L’assureur de responsabilité décennale devait donc sa garantie pour le coût des travaux de réfection de cet enduit. Mais les désordres causés (infiltrations dans l’appartement) ne sont pas couverts par cette assurance, car un enduit de façade n’est pas techniquement indivisible de l’ouvrage existant sur lequel il est appliqué et ne satisfait donc pas aux conditions posées par l’article L. 243-1-1 du Code des assurances (Cass. 3e civ., 16 février 2022, n° 20-20988).

RECEPTION

Réception tacite

La seule prise de possession – sans paiement de l’intégralité du marché – n’établit pas la volonté du maître d’ouvrage de réceptionner les travaux, et donc de caractériser la réception tacite, pour laquelle il convient de constater une volonté non équivoque de recevoir l’ouvrage ; ce d’autant plus que les maîtres d’ouvrage avaient introduit un référé expertise (Cass. 3e civ., 5 janvier 2022, n° 20-22835). La question de la réception tacite se pose encore moins s’il n’y a pas de prise de possession (Cass. 3e civ., 2 mars 2022, n° 21-10048).

La réception tacite est caractérisée en cas de paiement de la totalité du prix à la date de prise de possession (Cass. 3e civ., 29 juin 2022, n° 21-17997). Ou encore, lorsque le maître d’ouvrage a pris possession des lieux et que la partie du prix non réglée correspond pour l’essentiel à la retenue de garantie dans l’attente de la levée des réserves (Cass. 3e civ., 15 juin 2022, n° 21-15023).

Sauf fraude de la part du maître d’ouvrage, lorsque l’ouvrage a déjà fait l’objet d’une réception expresse, il ne peut être demandé au juge de rechercher l’existence d’une réception tacite antérieure (Cass. 3e civ., 2 mars 2022, n° 20-16787, publié au Bulletin).

Réception judiciaire

Dès lors que l’immeuble était bien clos et couvert, que les huisseries étaient posées dans leur presque totalité et que les travaux à terminer – hormis les reprises des désordres et malfaçons – pour permettre une occupation même rudimentaire de la maison étaient peu importants par comparaison aux transformations et aménagements déjà réalisés, la maison pouvait être considérée comme habitable à la date de l’abandon du chantier. La réception judiciaire pouvait donc être prononcée à cette date (Cass. 3e civ., 15 juin 2022, n° 21-13612).

Réception partielle

La réception de travaux qui ne constituent pas des tranches indépendantes ou ne forment pas un ensemble cohérent ne vaut pas réception au sens de l’article 1792-6 du Code civil. La réception partielle par étage est donc impossible (Cass. 3e civ., 16 mars 2022, n° 20-16829, Bull.).

LES GARANTIES LEGALES

Désordres apparents

Dès lors qu’il appartient au maître d’ouvrage – de jurisprudence désormais constante – de prouver la clandestinité des désordres à la réception pour espérer faire application de la garantie décennale (Cass. 3e civ., 2 mars 2022, n° 21-10753, Bull.), il a été jugé que les désordres tenant à l’installation de chauffage, non réservés à la réception, même tacite (Cass. 3e civ., 29 juin 2022, n° 21-17997), étaient purgés (Cass. 3e civ., 2 mars 2022, n°s 20-22636 et 21-14912). Le caractère apparent ou caché d’un vice s’apprécie au regard du maître d’ouvrage et de ses compétences ; ainsi, le professionnel de la conception d’opérations immobilières aurait dû voir et réserver le défaut de conformité à la réglementation relative à l’accès des personnes handicapées, tenant à des dimensions insuffisantes (Cass. 3e civ., 29 juin 2022, n° 21-18304).

Bénéficiaire

Le maître d’ouvrage initial conserve la faculté d’exercer l’action en garantie contre les constructeurs notamment lorsqu’il est condamné à réparer les vices de l’ouvrage (Cass. 3e civ., 2 mars 2022, n° 20-16470).

Imputabilité et présomption

Pour espérer faire application de la présomption de responsabilité décennale à l’égard des constructeurs, son bénéficiaire doit rapporter la preuve du lien d’imputabilité entre la mission confiée au constructeur et ce dommage, en démontrant que celui-ci a concouru à la réalisation de la partie d’ouvrage dans la sphère de laquelle le dommage trouve son siège. En l’espèce, la Cour admet l’existence d’un lien d’imputabilité entre l’incendie ayant affecté les panneaux photovoltaïques et la mission du constructeur (Cass. 3e civ., 29 juin 2022, n° 21-17919).

Gravité décennale

Les suspentes de structure métallique des ossatures sur les plafonds insuffisamment fixés compromettaient la stabilité de l’ouvrage en cas de surcharge climatique de type neige, avec un risque de déformation et de rupture. Cela constitue un risque pour la sécurité de l’ouvrage et de ses occupants et rend l’ouvrage impropre à sa destination, caractérisant ainsi la gravité décennale (Cass. 3e civ., 15 juin 2022, n° 21-15023). Les nuisances sonores des blocs moteurs pour la climatisation de l’hôtel qui ont conduit les voisins de l’ouvrage construit à introduire une action en justice, auraient pu entraîner la responsabilité décennale des constructeurs si les désordres n’avaient pas été apparents à la réception (Cass. 3e civ., 29 juin 2022, n° 21-17997).

En application des articles 1792 du Code civil et L. 242-1 du Code des assurances, l’assurance dommages ouvrage (DO) garantit notamment les dommages qui, affectant l’ouvrage dans un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination dans les dix ans après la réception. Viole ces dispositions la cour d’appel qui, pour rejeter la demande, retient que le risque pour la santé et la sécurité des occupants résultant de l’absence de raccordement des évents ne s’était pas concrétisé à la date de l’expertise. Ce, alors qu’elle avait constaté que selon l’expert, ce défaut de raccordement provoquait des odeurs nauséabondes présentant un danger pour la santé des personnes, de sorte que le risque sanitaire lié aux nuisances olfactives rendait, en lui-même, l’ouvrage impropre à sa destination durant le délai d’épreuve (Cass. 3e civ., 11 mai 2022, n° 21-15608, Bull.).

Primauté de la garantie légale

Les désordres qui relèvent d’une garantie légale (décennale, biennale) ne peuvent donner lieu à une action en réparation, contre les personnes tenues à cette garantie, sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun (Cass. 3e civ., 11 mai 2022, n° 20-18318).

RESPONSABILITE TOUS AZIMUTS

Avant réception

L’article 1788 du Code civil, qui rend le constructeur garant du risque de la perte de la chose avant réception, a vocation à s’appliquer même lorsqu’une reconstruction complète de l’ouvrage n’est pas nécessaire. Le constructeur est donc comptable de la destruction partielle de l’ouvrage avant réception (Cass. 3e civ., 25 mai 2022, n° 21-15883, Bull.).

Les fautes éventuellement commises par les constructeurs et qui ont pu être à l’origine de la destruction de l’ouvrage n’empêchent pas le maître d’ouvrage de leur réclamer, sur le fondement de l’article 1788 précité, en dehors de toute recherche de responsabilité, la restitution du prix des travaux qu’ils ne sont pas en mesure de livrer (Cass. 3e civ., 25 mai 2022, n° 21-18098, Bull.).

 Contrôleur technique

 Il n’incombe pas au contrôleur technique de vérifier que ses avis sont suivis d’effet. Ainsi, le maître d’œuvre responsable d’un désordre d’infiltrations en sous-sol résultant d’un cuvelage réalisé sur des hypothèses de calcul non conformes aux prescriptions du contrôleur technique voit sa demande de garantie formée à son encontre rejetée (Cass. 3e civ., 29 juin 2022, n° 21-16511).

 CCMI

La renonciation au bénéfice de la garantie de livraison proposée par la banque à son client maître d’ouvrage n’est pas valable (Cass. 3e civ., 5 janvier 2022, n°s 20-19775 et 20-20327).

Les pénalités de retard contractuellement prévues au CCMI peuvent se cumuler avec d’autres indemnités pour des préjudices distincts, tels que des préjudices de jouissance, moraux ou de perte de chance de gains immobiliers (Cass. 3e civ., 5 jan­vier 2022, n° 20-21208).

Le défaut d’implantation altimétrique d’un ouvrage objet d’un CCMI peut conduire à la résolution du contrat et au remboursement consécutif au maître d’ouvrage des appels de fonds déjà payés (Cass. 3e civ., 16 février 2022, n° 20-22538).

Il résulte des articles L. 231-11 et L. 231-12 du Code de la construction et de l’habitation (CCH) que la période devant être prise en compte pour le calcul de la révision du prix du contrat est celle s’écoulant entre la signature de ce dernier et l’expiration d’un délai d’un mois qui suit la plus tardive des deux dates entre la date de l’obtention, tacite ou expresse, des autorisations administratives nécessaires pour entreprendre la construction, et la date de réalisation de la condition suspensive, rappelle la Cour (Cass. 3e civ., 15 juin 2022, n° 21-12733, Bull.).

Répartition entre coobligés

La répartition de la charge définitive de la dette entre coobligés s’effectue en fonction de la gravité de leurs fautes respectives. Il appartient ainsi à la cour d’appel de caractériser, dans les rapports entre coobligés, la faute de la société immobilière en lien causal avec les vices de construction et défauts de conformité apparents, que celle-ci était tenue de garantir en sa qualité de vendeur en l’état futur d’achèvement (Cass. 3e civ., 11 mai 2022, n° 19-10226).

Responsabilité du maître d’oeuvre

Après l’achèvement de travaux de transformation d’un immeuble en hôtel-restaurant, le locataire est fondé à demander, sur le terrain délictuel, la condamnation du maître d’œuvre en réparation du préjudice subi du fait de ses manquements contractuels (dont le dépassement de l’enveloppe budgétaire), qui a engendré des retards (Cass. 3e civ., 5 janvier 2022, n° 20-22867).

Le maître d’œuvre est responsable de ne pas avoir attiré l’attention du maître d’ouvrage sur les conséquences techniques de ses choix et la nécessité de réaliser certains ouvrages non prévus (Cass. 3e civ., 16 février 2022, n° 20-16952).

La clause prévoyant que l’architecte ne pourra être tenu res­ponsable ni solidairement ni in solidum des fautes commises par d’autres intervenants à l’opération ne limite pas la responsabilité contractuelle de droit commun de l’architecte, tenu de réparer les conséquences de sa propre faute, le cas échéant in solidum avec d’autres constructeurs. Elle ne saurait avoir pour effet de réduire le droit à réparation du maître d’ouvrage contre l’architecte, quand sa faute a concouru à la réalisation de l’entier dommage (Cass. 3e civ., 19 janvier 2022, n° 20-15376, Bull.).

Responsabilité du fabricant

Les personnes responsables de plein droit en application des articles 1792 et suivants du Code civil ne peuvent agir en garantie contre les autres respon­sables tenus avec elles au même titre, que sur le fondement de la responsabilité de droit commun applicable dans leurs rapports. Dès lors, l’entrepreneur chargé du lot « électricité » qui a indemnisé le maître d’ouvrage ne peut agir en garantie contre le fabricant ou l’importateur des projecteurs litigieux que sur le fondement de la responsabilité de droit commun, à l’exclusion de l’article 1792-4 du Code civil, même s’il s’agit d’un élément pouvant entraîner la responsabilité solidaire (Epers) [Cass. 3e civ., 20 avril 2022, n° 21-14182, Bull.].

Garantie des vices cachés

Viole la loi la cour d’appel qui, pour rejeter l’action en garantie des vices cachés engagée par l’acquéreur d’une maison en raison de nuisances provenant de l’échouage saisonnier d’algues sargasses, retient qu’un phénomène extérieur, naturel, dont la survenue était imprévisible, ne constitue pas un vice caché (Cass. 3e civ., 15 juin 2022, n° 21-13286, Bull.).

Le constructeur n’est pas débiteur, mais créancier, de l’action en garantie des vices cachés, qu’il peut exercer contre le fabricant en application de l’article 1648 du Code civil à compter de la date de l’assignation délivrée contre lui (Cass. com., 29 juin 2022, n° 19-20647, Bull.).

L’action en garantie des vices cachés relative à des biens vendus après l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile doit être formée dans le délai de deux ans à compter de la découverte du vice ou, en matière d’action récursoire, à compter de l’assignation, sans pouvoir dépasser le délai butoir de vingt ans résultant de l’article 2232 du Code civil et courant à compter de la vente initiale (Cass. 3e civ., 25 mai 2022, n° 21-18218, Bull.).

L’entrepreneur ne pouvant pas agir contre le vendeur et le fabricant avant d’avoir été lui-même assigné par le maître d’ouvrage, le point de départ du délai qui lui est imparti par l’article 1648, alinéa 1, du Code civil est constitué par la date de sa propre assignation. Et le délai quinquennal de l’article L. 110-4, I du Code de commerce, courant à compter de la vente, est sus­pendu jusqu’à ce que sa responsabilité ait été recherchée par le maître d’ouvrage (Cass. 3e civ., 16 février 2022, n° 20-19047, Bull.).

 

MARCHES DE TRAVAUX ET DE MAITRISE D’OEUVRE

Marché à forfait

La réalisation de travaux d’aménagement intérieur d’une maison n’étant pas assimilable, au sens de l’article 1793 du Code civil, à la construction d’un bâtiment selon un plan arrêté et convenu avec le propriétaire du sol, les dispositions du code relatives au forfait sont inapplicables (Cass. 3e civ., 16 février 2022, n° 21-12060).

Prix

Un accord préalable sur le montant exact de la rémunération n’est pas une condition de la formation du contrat de louage d’ouvrage, présumé conclu à titre onéreux ; en l’absence d’un tel accord, il appartient aux juges du fond de fixer la rémunération. En l’espèce, la cour d’appel avait à tort débouté le maître d’œuvre de sa demande de paiement d’honoraires au motif que la signature du maître d’ouvrage sur la demande de permis de construire ne permettait pas de démontrer la rencontre des volontés sur le montant des honoraires, qui se calcule à partir de celui des travaux (Cass. 3e civ., 19 janvier 2022, n° 20-22059).

Paiement du solde

Lorsque les conditions générales du marché de travaux ne prévoient pas de sanction en cas de dépassement par l’entreprise du délai de soixante jours à compter de la réception pour transmettre son mémoire définitif, le juge ne peut en tirer aucune conséquence à son détriment (Cass. 3e civ., 25 mai 2022, n° 21-15736).

Dès lors que la norme Afnor NF P 03-001, applicable au marché, dispose que l’entrepreneur remet au maître d’œuvre le mémoire définitif des sommes qu’il estimait lui être dues en application du marché dans le délai de soixante jours à dater de la réception ou de la résiliation, la notification par l’entreprise d’un mémoire antérieurement à la réception expresse ne pouvait faire courir le délai imparti au maître d’ouvrage pour notifier le décompte général définitif (Cass. 3e civ., 6 avril 2022, n° 19-25268).

ASSURANCES

Risque décennal

La Cour rappelle qu’un désordre ne peut engager la responsabilité décennale du constructeur et déterminer la mise en œuvre de la garantie obligatoire de son assureur que s’il est apparu après réception. Et qu’il appartient donc au juge du fond de rechercher si le maître d’ouvrage n’avait pas eu connaissance de tout ou partie de ces désordres avant la réception prononcée sans réserve, sauf à ce que ceux-ci se manifestent ultérieurement dans une ampleur et des conséquences inconnues au jour de la réception (Cass. 3e civ., 25 mai 2022, n° 21-13441).

Preuve du contrat d’assurance

Lorsqu’un maître d’ouvrage sollicite le bénéfice d’un contrat d’assurance de responsabilité d’un constructeur, dont il n’est par définition pas partie, il appartient à l’assureur concerné de démontrer, en versant la police aux débats, qu’il ne doit pas sa garantie pour le sinistre en cause (Cass. 3e civ., 2 mars 2022, n° 20-22486).

Exclusion

 En commençant les travaux avant l’obtention du permis de construire, l’architecte contrevient à ses règles professionnelles. Il se rend complice d’une infraction pénale qui justifie que lui soit opposée par son assureur une exclusion de garantie, qui prive l’assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de la réalisation du risque (Cass. 3e civ., 20 avril 2022, n° 21-16297, Bull.).

Attestations d’assurance

Une cour d’appel n’est pas tenue de rechercher d’office si l’assureur a engagé sa responsabilité délictuelle pour avoir délivré une attestation d’assurance avant que la déclaration régulière de chantier qui conditionne la garantie n’ait été effectuée (Cass. 3e civ., 11 mai 2022, n° 21-15420, Bull.).

Déclaration du risque

En application de l’article L. 113-9 du Code des assurances, faute pour l’assuré d’avoir déclaré la mission qui lui a été confiée et d’avoir payé les primes afférentes, l’indemnité d’assurance est réduite en proportion du taux de la prime annuelle payée par rapport à celui de la prime qui aurait été due si la mission avait été déclarée. La réduction se calcule par année d’assurance, et non pas eu égard à chaque mission (Cass. 3e civ., 11 mai 2022, n° 21-15420, Bull.).

Activité déclarée

Lorsque le contrat d’assurance de responsabilité décennale obligatoire stipule qu’il n’a pas pour objet de garantir l’assuré intervenant en qualité de constructeur de maisons individuelles au sens du CCH, la circonstance que l’assuré ait déclaré l’ensemble des activités nécessaires à l’édification d’une maison individuelle n’y change rien. Cela constitue un cas de non-garantie (Cass. 3e civ., 2 mars 2022, n° 21-12096).

Dommages ouvrage

L’arrêt d’appel, qui retient que le refus fautif par l’assureur DO de la prise en charge de désordres de nature décennale a participé à l’allongement de la durée d’exécution des travaux de reprise et a donc causé au maître d’ouvrage un préjudice financier, viole l’article L. 242-1 du Code des assurances qui fixe limitativement les sanctions applicables au manquement de l’assureur à ses obligations (Cass. 3e civ., 19 janvier 2022, n°s 20-17697 et 20-17758).

Le juge ne peut pas condamner l’assureur DO, au titre de la sanction pour non-respect des délais de la procédure amiable, à faire application du volet facultatif du contrat d’assurance garantissant les dommages immatériels, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la garantie des dommages immatériels prévue par les conditions générales de la police n’était pas subordonnée à la constatation que ces dommages étaient consécutifs à un dommage matériel résultant d’un désordre de nature décennale (Cass. 3e civ., 2 mars 2022, n° 21-10155).

Après l’expiration du délai de quatre-vingt-dix jours suivant la réception de la déclaration de sinistre, l’assureur qui a offert l’indemnisation des travaux propres à remédier aux dommages ne peut ni contester la définition des travaux utiles à cet effet ni par conséquent réclamer la restitution d’indemnités affectées par l’assuré à l’exécution des travaux qu’elles étaient destinées à financer (Cass. 3e civ., 16 février 2022, n° 20-22618, Bull.).

L’assuré en DO qui assigne son assureur après le délai décennal mais avant l’expiration du délai biennal du droit des assurances, est exposé à se voir opposer les termes de l’article L. 121-12 du Code des assurances. En effet, l’assureur qui refuse sa garantie ne peut agir contre les responsables à titre subrogatoire ou les appeler en garantie avant d’avoir été lui-même poursuivi, de sorte qu’il appartient à l’assuré de l’assigner dans un délai lui permettant d’appeler les responsables en garantie ou, à défaut, d’assigner lui-même les responsables pour préserver les recours de l’assureur (Cass. 3e civ., 25 mai 2022, n° 21-18518, Bull.).

EXPERTISE

 Référé préventif

 Les règles du Code de l’environnement relatives aux travaux à proximité des réseaux, qui imposent déjà à l’exploitant de communiquer des informations telles que la localisation des ouvrages enterrés, n’excluent pas la possibilité pour le maître d’ouvrage d’engager une procédure de référé préventif sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile, dès lors qu’il justifie d’un motif légitime pour solliciter une telle expertise (Cass. 3e civ., 16 février 2022, n° 21-11926, Bull.).

Clause et conciliation

Le syndicat de copropriétaires qui avait connaissance (au stade de l’expertise judiciaire) du contrat de maîtrise d’œuvre passé préalablement avec le maître d’ouvrage, ne pouvait assigner l’architecte au fond sans faire préalablement application de la clause de conciliation contenue au contrat (Cass. 3e civ., 5 janvier 2022, n° 20-10147).

La clause de saisine de l’ordre des architectes préalable à toute action judiciaire, en cas de litige sur le respect du contrat, ne peut porter que sur les obligations des parties au regard des dispositions de l’article 1134 (aujourd’hui 1103) du Code civil, et n’a donc pas vocation à s’appliquer dès lors que la responsabilité de l’architecte est recherchée sur le fondement de l’article 1792 du même code (Cass. 3e civ., 11 mai 2022, n° 21-16023, Bull.). La clause de conciliation préalable du contrat d’architecte ne peut pas être valablement opposée à l’architecte qui forme une demande reconventionnelle aux fins de paiement de ses honoraires dans le cadre d’un contentieux déjà introduit par le maître d’ouvrage (Cass. 3e civ., 16 mars 2022, n° 21-11951).

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