COURDE CASSATION – premier SEMESTRE 2015
Marches privés : six mois de droit de la construction
L’OUVRAGE, L’ELEMENT D’EQUIPEMENT ET LA RECEPTION
Réception expresse
L’absence de l’entreprise aux opérations de réception ne prive pas le procès-verbal de réception signé par le maître d’ouvrage de son caractère contradictoire dès lors qu’elle avait été dûment convoquée (Cass. 3e civ., 3 juin 2015, 14-17744). Le paiement de la facture de l’entreprise qui précède l’établissement d’un procès-verbal de réception ne suffit à faire rétroagir la date de la réception au jour dudit paiement et à en changer la nature express pour en devenir tacite (Cass. 3e civ., 24 mars 2015, 14-10723).
Réception tacite
Le paiement des travaux de maçonnerie, l’existence d’une lettre du maître d’œuvre imputant à l’entreprise de maçonnerie diverses malfaçons, et le fait le chantier soit resté en l’état pendant une année après l’intervention de l’entreprise, n’ont pas suffi pas à caractériser une volonté non équivoque du maître d’ouvrage de réceptionner le lot du maçon, à défaut de sa prise de possession (Cass. 3e civ., 30 juin 2015, n° 13-23007).
La clause d’un contrat de construction de maison individuelle passé entre un professionnel et un non-professionnel qui prévoit que « toute prise de possession ou emménagement avant la rédaction du procès-verbal de réception signé par le maître de l’ouvrage et le maître de l’œuvre, entraîne de fait la réception de la maison sans réserve et l’exigibilité de l’intégralité des sommes restant dues, sans contestation possible » est réputée non écrite dès lors qu’elle crée au détriment du maître d’ouvrage de la construction un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties puisqu’elle impose à ce dernier une définition extensive de la réception, contraire à la loi, ayant pour effet annoncé de rendre immédiatement exigibles les sommes restant dues. On relèvera qu’une telle clause devait être réputée non écrite puisque la réception suppose la volonté non équivoque du maître de recevoir l’ouvrage que la seule prise de possession ne suffit pas à établir (Cass. 3e civ., 6 mai 2015, n° 13-24947, Bull.).
Le paiement partiel de la facture d’une entreprise est impropre à caractériser la volonté non équivoque du maître de l’ouvrage de recevoir les travaux, au regard des dysfonctionnements affectant l’installation de chauffage en cause ayant justifié que le maître d’ouvrage, après expertise, assigne l’entreprise et son assureur en paiement des travaux de reprise et indemnisation de ses préjudices (Cass. 3e civ., 10 mars 2015, 13-19997).
La prise de possession des maîtres de l’ouvrage apparaissait insuffisante à caractériser leur volonté non équivoque d’accepter les immeubles, ce qui excluait leur réception tacite, dès lors qu’ils avaient exprimé leur insatisfaction, énoncé la persistance de désordres susceptibles d’entraîner des difficultés avec leur locataires et indiqué : « à finition de ces travaux, veuillez me confirmer une date de réception », et qu’il leur restait à payer une somme représentant 15 % du montant du marché (Cass. 3e civ., 3 juin 2015, 14-10392-14-10929).
Mais l’achèvement de l’immeuble, sa livraison aux acquéreurs, l’existence d’un procès-verbal d’état des lieux et de remise des clés, l’existence d’une déclaration d’achèvement des travaux adressée à la mairie et le règlement des constructeurs, sont de nature à caractériser l’existence d’une réception tacite (Cass. 3e civ., 10 mars 2015, n° 13-26896 et 14-10053).
Réception judiciaire
Pour prononcer la réception judiciaire d’un ouvrage, il suffit à la Cour d’appel de constater l’habitabilité de l’ouvrage à une date déterminée, peu important qu’elle ait été rendue possible par des travaux de reprise et d’achèvement réalisés après le départ du chantier de la première entreprise au contradictoire de qui ladite réception est notamment judiciairement recherchée (Cass. 3e civ., 30 juin 2015, n° 14-20246). N’a pas donné de base légale à sa décision, la cour d’appel qui refuse de prononcer la réception judiciaire des travaux, en se fondant sur l’importance des désordres sans rechercher si, compte tenu de leur nature, l’ouvrage n’était pas en état d’être reçu (Cass. 3e civ., 25 mars 2015, 14-12875), seule condition de la réception judiciaire, peu important la nature et l’importante des réserves.
LES GARANTIES LEGALES
Présomption et imputabilité
Le constructeur de maison individuelle est tenu de plein droit envers le maître d’ouvrage d’une erreur d’implantation et des dommages causés par les travaux de construction qu’il a réalisés, l’éventuelle faute de sous-traitant n’étant pas une cause exonératoire de sa responsabilité mais le fondement d’une éventuelle action récursoire contre lui (Cass. 3e civ., 15 avril 2015, 14-13054).
Ne sont soumis à la présomption de responsabilité décennale que les locateurs d’ouvrage ayant concouru à la réalisation de l’ouvrage ou partie d’ouvrage dans laquelle le dommage trouve son siège. On ne peut appliquer la présomption de responsabilité qu’aux locateurs d’ouvrage à qui les dommages sont imputables. Les désordres dénoncés n’étant pas en l’espèce imputables aux travaux de réfection des façades et corniches de son immeuble réalisés par l’entrepreneur, le maître d’ouvrage ne rapportant pas la preuve par ailleurs de ce que la violation de l’obligation de conseil et d’information du professionnel serait à l’origine des désordres et malfaçons, sa garantie décennale ne peut être mise en œuvre. (Cass. 3e civ., 20 mai 2015, 14-13271, Bull.). On doit retenir de cet arrêt que la circonstance que l’entrepreneur n’ait pas physiquement concouru à la réalisation de la partie d’ouvrage litigieuse ne suffit pas à écarter leur imputabilité s’il est démontré que le locateur d’ouvrage violé son obligation de conseil et d’information. (voir aussi Cass. 3e civ., 25 mars 2015, n° 13-27584, 14-13927, 14-16441, 14-19942).
L’indétermination de l’origine des désordres affectant la cuve de carburant et l’absence de preuve de preuve de la faute de l’un ou l’autre des locateurs d’ouvrage ne constituent des motifs insuffisants à exclure la responsabilité de plein droit des constructeurs (Cass. 3e civ., 27 janvier 2015, 13-21945)
Garantie de bon fonctionnement
Les désordres qui affectent un carrelage -élément dissociable de l’immeuble, non destiné à fonctionner- ne compromettant pas la solidité de l’ouvrage ni ne le rendant impropre à sa destination, ne relèvent pas de la garantie de bon fonctionnement (mais de la responsabilité des constructeurs visés à l’article 1793-4-3 du Code civil) (Cass. 3e civ., 27 janvier 2015, 13-25514).
Gravité décennale
N’est pas recevable l’action directe du maître de l’ouvrage contre l’assureur décennal, en l’absence de preuve de désordres de nature décennale affectant l’ouvrage réalisé par l’assuré et survenus dans le délai dix ans suivant la date de réception des travaux. En l’occurrence, les défauts d’exécution de la toiture n’avaient provoqués aucune infiltration à l’intérieur des locaux, donc aucun dommage de gravité décennale pendant ledit délai (Cass. 3e civ., 20 mai 2015, 14-14773, Bull.).
On ne peut déduire du caractère limité du dépassement des normes d’isolation phonique applicables, une absence de désordre de gravité suffisante à l’application de la garantie décennale. En l’absence d’indication particulière dans le descriptif des prestations de l’immeuble vendu en l’état futur d’achèvement, l’exiguïté de l’accès à une place de parking qui rend celle-ci inutilisable pour une voiture de tourisme couramment commercialisée constitue une impropriété à la destination (Cass. 3e civ., 20 mai 2015, 14-15107, Bull.).
Dommages évolutifs
La garantie décennale s’applique à des désordres compromettant la stabilité du bassin d’une piscine survenus même postérieurement à l’expiration du délai décennal dès lors qu’ils constituent l’aggravation de désordres de gravité décennal survenus et dénoncés pendant le délai d’épreuve et objet d’une réparation s’avérant insuffisante (Cass. 3e civ., 11 mars 2015, n° 13-28351 et 14-14275).
Immixtion fautive et acceptation des risques
Le maître d’ouvrage marchand de biens n’a pas commis d’immixtion ou de faute ayant concouru à la réalisation des dommages, lorsqu’il n’est pas établi qu’il eût assumé une mission de contrôle des travaux de la société Star Bat ou une mission de coordination des entreprises, ni qu’il fût intervenu dans les travaux de gros œuvre confiés à cette société, l’exercice de la profession de marchand de biens ne conférant pas de compétence notoire en matière de construction (Cass. 3e civ., 21 janvier 2015, 13-25268, Bull.)
RESPONSABILITE TOUS AZIMUTS
Coordonnateur SPS
Engage sa responsabilité vis-à-vis d’un artisan victime d’un accident, le maître d’ouvrage qui n’a pas préalablement informé le coordonnateur sécurité et protection de la santé de sa présence sur le chantier alors que l’accomplissement de sa visite d’inspection préalable à son intervention en dépendait (Cass. 3e civ., 17 juin 2015, 14-13350, Bull.)
Acceptation du support
La circonstance de la réalisation par le maître d’ouvrage -non professionnel de la construction- de plots de fondations, et ce sans étude de sol préalable, n’exonère pas l’entreprise de construction de trois bâtiments à structure métallique sur lesdits plots, dès lors qu’elle avait accepté ce support sans réserve. Le sous-traitant chargée du montage de la structure, ne saurait pas plus être tenu responsable puisqu’il n’avait pas les compétences nécessaires pour apprécier la conception de l’ouvrage (Cass. 3e civ., 30 juin 2015, 14-17577).
Réticence dolosive du vendeur
Les vendeurs de leur maison qui ne démontrent pas avoir informé leurs acquéreurs, ni de la présence de fissures, ni de l’intervention de leur assureur dommages-ouvrageetde la réalisation des recherches des causes des fissures, alors qu’ils savaient que ces désordres n’étaient pas superficielsetconstituaient des renseignements importants pour la détermination des acquéreurs de contracter au prix demandé d’une part, et que le ravalement effectué peu avant la vente avait fait disparaître ces fissuresd’autre part, se sont délibérément rendus coupables d’une réticence dolosive d’information à propos de ces fissures provoquant l’erreur des acquéreurs (Cass. 3e civ., 2 juin 2015, 14-16063).
Diagnostiqueurs
Si la restitution, à laquelle le vendeur d’un lot de copropriété est tenu en vertu de l’article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 à la suite de la diminution du prix résultant d’une moindre mesure par rapport à la superficie convenue, ne constitue pas, par elle-même, un préjudice indemnisable permettant une action en garantie, le vendeur peut se prévaloir, à l’encontre du mesureur ayant réalisé un mesurage erroné, d’une perte de chance de vendre son bien au même prix pour une surface moindre (Cass. 3e civ., 28 janvier 2015, 13-27397, Bull.)
Garantie des vices cachés
Le syndicat des copropriétaires ayant qualité pour agir en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble, a qualité pour exercer, contre le vendeur des lots, l’action en réparation des désordres affectant les parties communes de l’immeuble (toiture) à raison de l’existence de vices cachés (Cass. 3e civ., 24 juin 2015, 14-15205, Bull.).
Responsabilité du maître d’œuvre
L’architecte signataire du dossier de permis de construire, qui a établi des plans de coupe faisant apparaître les côtes du terrain naturel et la nécessité d’affouillements très importants pour implanter les deux maisons, devait le conduire à s’interroger sur les vérifications faites par l’entreprise quant à la composition et à la stabilité du talus et sur la nécessité d’un confortement, peu important que les travaux de terrassement aient été réalisés par la société Robert avant son intervention, en sorte que l’architecte a bien commis une faute qui avait participé à la réalisation du dommage engagé sa responsabilité délictuelle à l’égard des maîtres de l’ouvrage (Cass. 3e civ., 3 juin 2015, 14-10392-14-10929).
Viole les dispositions de l’article 1147 du Code civil, la cour d’appel qui, pour accueillir la demande en paiement d’un solde d’honoraires de l’architecte, retient que celui-ci a rempli son obligation contractuelle qui consistait non pas à obtenir le permis de construire mais à déposer une demande de permis de construire (…) sans rechercher (…) si les modifications exigées par les services municipaux (…) ne résultaient pas de la méconnaissance par l’architecte des règles d’urbanisme (Cass. 3e civ., 28 janvier 2015, 13-28696).
Responsabilité de l’expert judiciaire
L’expert judiciaire dont les préconisations de réparation d’un dommage se sont avérées insuffisantes, engage sa responsabilité sur le fondement de l’article 1382 du Code civil, et l’entreprise, qui bien qu’intervenant pour exécuter les préconisations de l’expert, n’a pas émis de réserves auprès du maître d’ouvrage sur les travaux prescrits par ce dernier, a engagé sa responsabilité contractuelle pour avoir manqué à son obligation de conseil (Cass. 3e civ., 11 mars 2015, n° 13-28351 et 14-14275, Bull.)
Troubles anormaux de voisinage
Si l’édification d’un immeuble neuf sur le fond voisin du plaignant dont le terrain était à l’origine entouré de vergers lui cause incontestablement une gêne, la situation dont il se plaignait n’excédait toutefois manifestement pas le trouble normal de voisinage, dès lors qu’en devenant propriétaire d’un bien situé dans une artère de la commune bordée de lotissements composés de parcelles de faibles dimensions, il devait s’attendre à une forte urbanisation dans son voisinage et, notamment, à ce que le propriétaire du fonds limitrophe y édifie un bâtiment en limite séparative comme le permet le plan d’occupation des sols (Cass. 3e civ., 20 janvier 2015, n° 13-24558).
LA SOUS-TRAITANCE
Délai de prescription
Pour les contrats de sous-traitance conclus antérieurement à la mise en application des dispositions issues de l’ordonnance du 8 juin 2005 et de la loi du 17 juin 2008, en vue de la réalisation d’ouvrages dont la réception est intervenue plus de dix ans avant cette date, le délai de prescription de l’action en responsabilité dirigée contre les sous-traitants par l’entrepreneur principal, d’une durée de dix ans, court à compter du premier acte dénonçant les dommages à l’entrepreneur principal, et la mise en cause aux fins de désignation d’expert devant le juge des référés constitue le point de départ de ce délai (Cass. 3e civ., 3 juin 2015, 14-16823)
Présentation des sous-traitants – sous-traitance en chaine
C’est au sous-traitant de premier rang qu’il est fait obligation de présenter son propre sous-traitant de second rang à l’acceptation du maître d’ouvrage et non pas à l’entreprise qui n’est responsable que de la présentation de son seul sous-traitant direct, puisque l’article 2 de la loi de 1975 dispose que « le sous-traitant est considéré comme entrepreneur principal à l’égard de ses propres sous-traitants » (Cass. 3e civ., 21 janvier 2015, 13-18316, Bull.). En cas de déconfiture du sous-traitant de premier rang, le sous-traitant de second rang ne saurait donc faire grief à l’entreprise de ne pas l’avoir présenté au maître d’ouvrage alors qu’elle connaissait sa présence sur le chantier et de ne pas donc avoir pu jouir des garanties de paiement prévues à l’article 14 de la loi de 1975 et lui demander le règlement du solde de son marché.
Responsabilité du maître d’ouvrage
Lorsque l’entrepreneur a fait accepter le sous-traitant par le maître d’ouvrage, et fait agréé ses conditions de paiement, le maître d’ouvrage a l’obligation, en vertu de l’article 14-1 de la loi de 1975, d’exiger de l’entrepreneur principal qu’il justifie avoir fourni une caution, lorsque le sous-traitant ne bénéficie pas d’une délégation de paiement. A défaut, il engage sa responsabilité délictuelle et peut être condamné –comme en l’espèce-, in solidum avec l’entrepreneur, au paiement de dommages et intérêts équivalents au juste coût des travaux exécutés tels qu’estimés par un expert judiciaire consécutivement à la nullité du sous-traité que le sous-traitant avait judiciairement obtenu, même s’il est d’un montant supérieur à celui qui aurait été dû en exécution de l’action directe (Cass. 3e civ., 18 février 2015, 14-10604 et 14-10632, Bull.)
MARCHES DE TRAVAUX
Obligation de l’entrepreneur
Il appartient à l’installateur de prouver qu’il a, de manière certaine, remis les attestations de conformité délivrée par le comité national pour la sécurité des usagers de l’électricité (CONSUEL) au distributeur d’électricité ou au maître de l’ouvrage aux fins du raccordement de l’ouvrage au réseau électrique général aux fins de son habitabilité. La Cour de cassation a cassé un arrêt d’appel qui avait mis à la charge du maître d’ouvrage la charge du défaut de production des attestations par l’installateur électricien (Cass. 3e civ., 25 mars 2015, 14-12875 11872, Bull).
Marché à forfait
Lorsque la notice descriptive annexée au contrat de construction prévoit que le prix forfaitaire comprenait le raccordement des eaux usées et des eaux vannes à l’antenne en attente en limite de propriété, sans chiffrer le coût du raccordement au réseau public ni préciser sur qui devait peser la charge de ces travaux, les travaux de branchement nécessaires à l’utilisation de l’immeuble sont réputés compris dans le prix forfaitaire convenu et le constructeur doit en supporter le coût (Cass. 3e civ., 11 mars 2015, 14-10002).
Retenue de garantie
L’entrepreneur qui sous-traité une partie de son marché en prévoyant dans le contrat de sous-traitant une retenue de garantie destinée -conformément aux dispositions de la loi du 16 juillet 1971- à satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l’ouvrage, à hauteur de 5 % du montant des travaux, peut aussi prévoir une retenue de bonne fin de l’exécution par le sous-traitant des travaux jusqu’à la réception d’un montant de 5 % du marché, pouvant être remplacée par une garantie bancaire à première demande, mobilisable en particulier en cas de défaillance du sous-traitant (Cass. 3e civ., 17 juin 2015, 14-19863, Bull.).
Clause pénale
Lorsque l’entreprise conteste la créance indemnitaire de pénalités de retard alléguée par le maître d’ouvrage, et qu’elle invoque quant à elle une créance de solde de travaux, le maître d’ouvrage ne peut solliciter et obtenir la compensation légale entre ces deux créances, puisque la première créance n’est ni certaine, ni liquide ni exigible alors que la second l’est (Cass. 3e civ., 24 mars 2015, 13-25106, Bull. ), condition en effet posée par les articles 1289 et suivants du Code civil pour opérer une telle compensation. Le maître d’ouvrage aurait toutefois pu solliciter une compensation judiciaire soit ordonnée entre les dettes réciproques ayant un lien suffisant de connexité entre elle pour être issues de l’exécution du même contrat, et en dépit du fait que les dettes n’étaient pas encore liquides et exigibles. Il eut fallu cependant que le maître d’ouvrage produise sa créance à la procédure collective de l’entreprise, ce qui ne fut pas le cas en l’espèce.
Vefa
L’aggravation des vices apparents à la livraison ne permet pas aux acquéreurs de second rang d’une vente en vefa d’agir à l’encontre dudit vendeur au-delà du délai d’un an et un mois prévu à l’article 1648 alinéa 2 du Code civil ; l’aggravation du premier vice n’emportant aucune modification du délai d’action (Cass. 3e civ., 3 juin 2015, 14-14706, Bull.).
ASSURANCES
Activités déclarées
L’activité de constructeur de maison individuelle incluant la réalisation de travaux décrits au marché, l’assureur ne saurait opposer une non garantie en soutenant que les opérations de construction neuve de maison individuelle n’étaient pas applicables à des marchés de travaux (Cass. 3e civ., 21 janvier 2015, 13-25268, Bull.).
Attestations d’assurance et responsabilité de l’assureur
L’attestation d’assurance imprécise ne permettant pas de savoir que l’entrepreneur n’était pas assuré pour l’activité de construction de véranda de plus de 75m3, engage la responsabilité de l’assureur tenu d’une obligation de renseignement à l’égard de l’assuré à qui il délivre une attestation destinée à l’information des bénéficiaires de cette garantie (Cass. 3e civ., 27 janvier 2015, 13-26591).
Avant réception
La garantie d’assurance de chose couvrant les travaux de l’entreprise avant réception à raison d’une « menace grave et imminente d’effondrement » n’a vocation à s’appliquer qu’à l’aune de la seule menace pesant sur la partie d’ouvrage qu’elle a déjà réalisée et non pas au regard du risque que la poursuite de la réalisation des travaux ferait peser sur ladite partie d’ouvrage (Cass. 3e civ., 5 mai 2015, n° 14-12235)
Dommages ouvrage
L’action judiciaire formée contre l’assureur dommages-ouvrage et celle formée contre l’assureur CNR, quoique tendant à une même fin, n’ont pas le même objet, en sorte que l’effet interruptif de prescription de la première ne s’étant pas à la seconde (Cass. 3e civ., 2 juin 2015, 14-14047).
Si l’assureur dommages ouvrage est déchu du droit d’invoquer la nullité de la police d’assurance dès lors qu’il n’a pas respecté l’un des délais de 60 ou 90 jours dans lesquels il doit prendre position sur sa garantie et proposer l’indemnité d’assurance, le dépassement des délais légaux ne lui rend pas impossible l’exercice d’un recours subrogatoire contre les auteurs du dommage quel que soit le fondement juridique donné à cette action (Cass. 3eciv., 5 mai 2015, n° 14-13074 et Cass. 3e civ., 5 mai 2015, 14-11150).
La recevabilité de l’exercice du recours subrogatoire de l’assureur dommage ouvrage est conditionné au versement de l’indemnité dans le délai de la garantie décennale (Cass. 3e civ., 7 avril 2015, 14-12212).
Inobservation des règles de l’art
L’entreprise qui ne respecte pas les règles de l’art, notamment les DTU, suit « de façon approximative et inacceptable les prescriptions de l’architecte des bâtiments de France », utilise « des matériaux inadaptés », et « réalise une structure de béton armé non conforme aux règles de dimensionnement et de conception d’un tel ouvrage », peut se voir valablement opposé par son assureur la clause de sa police d’assurance excluant « les dommages résultant de l’inobservation consciente, délibérée ou inexcusable des règles de l’art applicables dans le secteur du bâtiment et du génie civil aux activités garanties, telles que ces règles sont définies par les documents techniques des organismes techniques compétents à caractère officiel et spécialement les documents techniques unifiés (DTU) publiés par le Centre scientifique et technique du bâtiment ou par les normes françaises homologuées diffusées par l’Association française de normalisation ou, à défaut, par la profession, ou de prescriptions du fabricant, lorsque cette inobservation est imputable à l’assuré… » que la Cour de cassation juste suffisamment formelle et limitée (Cass. 3e civ., 24 mars 2015, 13-25737).
Franchise
L’opposabilité de la franchise aux tiers lésés emporte le droit pour l’assureur de responsabilité civile du sous-traitant de déduire son montant de l’indemnité susceptible d’être versée à l’assureur dommages exerçant son action subrogatoire au titre de la responsabilité dudit sous-traitant. En effet, si les franchises en matière d’assurance de responsabilité décennale obligatoire sont inopposables aux tiers lésés bénéficiaires de l’indemnité d’assurance ou de son assureur dommages-ouvrage subrogé dans ses droits, ces franchises sont opposables aux tiers lésés en matière d’assurance de responsabilité facultative (Cass. 3e civ., 17 février 2015, 14-13703).
Obligation d’assurance RCD
Un contrat de vente visant « des matériels non spécifiques, s’agissant de bâtiments pré-conçus », les structures commandées ne nécessitant par ailleurs aucune fondation ni travail d’adaptation de la part d’une entreprise spécialisée dans la vente et la location d’abris démontables destinés à l’entreposage temporaire, excepté la mise en place de points d’ancrage d’une profondeur réduite et de pièces de liaisons entre les bâtiments, posées sur un sol aménagé sous la seule responsabilité de l’acquéreur, ne permettait pas à la SCI acquéreur d’opposer à l’entreprise l’absence de souscription d’une assurance couvrant sa garantie décennale ; la circonstance que cette installation soit soumise à un permis de construire ne pouvant suffire à qualifier ladite convention de contrat de construction (Cass. 3e civ., 6 mai 2015, 13-26723).
Prescription biennale
Le moyen de défense de l’assureur tenant à une réduction proportionnelle de primes (pour défaut de déclaration des chantiers de son assuré architecte), peut être opposé à audit assuré plus de deux ans après la demande en paiement de l’indemnité introduite par l’assuré (Cass. 3e civ., 2 juin 2015, 13-17513).
PROCEDURE
Portée d’une expertise amiable
Le juge « ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties » (Cass. 2e civ., 5 mars 2015, 14-10861).
Interruption suspension Prescriptions
L’article 2241 al. 2 du Code civil ne distinguant pas entre le vice de forme et l’irrégularité de fond, l’assignation même affectée d’un vice de fond, tel le défaut de constitution d’un avocat inscrit au barreau du tribunal saisi, a un effet interruptif (Cass. 2e civ., 11 mars 2015, 14-15198, Bull.)
Une demande en justice, même formée devant un juge incompétent, interrompt le délai de prescription (Cass. 2e civ., 19 février 2015, 13-26682).
Lorsque les dommages affectent les parties communes et des parties privatives procèdent des mêmes désordres, l’effet interruptif de prescription de l’assignation délivrée par le syndicat bénéficie aux copropriétaires intervenant à titre individuel (Cass. 3e civ., 10 mars 2015, 13-28186).