Ancien ID : 772
La 3ème chambre de la Cour de Cassation a rendu le 13 avril 2010 deux arrêts relatifs aux conditions de mise en œuvre de la retenue de garantie applicable aux marchés de travaux privés visés à l’article 1779,3° du Code civil, instaurée par la loi du 16 juillet 1971.En vertu du premier alinéa de l’article 1er de la loi n° 97-584 du 16 juillet 1971 :
« Les paiements des acomptes sur la valeur définitive des marchés de travaux privés visés à l’article 1779 – 3° du Code civil peuvent être amputés d’une retenue égale au plus à 5 p.100 de leur montant et garantissant contractuellement l’exécution des travaux pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l’ouvrage. »
Comme le prévoit l’alinéa 4 du même article, il peut être substitué à cette retenue de garantie pratiquée par le maître d’ouvrage une caution, fournie par l’entrepreneur, personnelle et solidaire émanant d’un établissement financier.
Cette loi a donc crée une véritable garantie de bonne exécution des obligations de l’entrepreneur, au profit du maître d’ouvrage.
Par ces deux arrêts, la 3ème chambre civile apporte des précisions sur les conditions d’application de cette garantie, et plus particulièrement dans l’hypothèse où l’entrepreneur a fourni une caution personnelle et solidaire d’une banque, en substitution de la retenue de garantie de 5% du marché de travaux.
Dans ces deux espèces, l’entrepreneur avait fourni au maître d’ouvrage une caution personnelle et solidaire d’une banque.
L’entrepreneur ayant abandonné le chantier avant l’achèvement des travaux, le maître de l’ouvrage avait sollicité de la banque qu’elle lui verse la somme représentant la retenue de garantie.
Dans les deux espèces la Cour d’Appel avait fait droit à cette demande et avait condamné la banque a versé au maître d’ouvrage le montant de la retenue de garantie.
La 3ème chambre civile a cassé ces deux arrêts au motif que :
«le constat contradictoire de l’état de la qualité des travaux ne constituait pas un procès verbal de réception de ceux-ci. »
Ainsi la Cour de Cassation pose la réception des travaux comme condition indispensable au versement de la somme objet du cautionnement.
Cette solution n’est pas nouvelle.
En effet dans un arrêt du 26 février 1992 (Cass. 3e civ., 26 février 1992, n° 90-12684, Bull. civ. III n° 63), la 3ème chambre civile avait approuvé la Cour d’Appel qui avait rejeté la demande de condamnation de la banque au paiement du montant du cautionnement formée par le maître d’ouvrage, au motif que la réception dont se prévalait le maître d’ouvrage était irrégulière dès lors qu’elle n’avait pas été prononcée au contradictoire de l’entrepreneur.
Par un arrêt du 10 juillet 1996 la Cour de Cassation s’est prononcée dans le même sens (Cass. 3e civ., 10 juillet 1996, n° 94-17926).
Il s’agit d’une application stricte de l’article 1er de la loi du 16 juillet 1971 puisque la garantie instaurée par cette loi a pour objet d’assurer au maître d’ouvrage la bonne exécution des travaux et notamment l’exécution des travaux nécessaires à la levée des réserves.
Or, tant qu’il n’y a pas eu de réception, il ne peut y avoir de réserve.
Source :
Cass. 3e civ., 13 avril 2010, n° 09-11173
Résumé : « Ne tire pas les conséquences légales de ses constatations et viole l’article 1er de la loi n° 71-584 du 16 juillet 1971 la cour d’appel qui, pour condamner la caution de l’entrepreneur au paiement du montant de la retenue de garantie, retient que celle-ci ne s’applique pas aux seuls travaux mal exécutés mais peut concerner l’inexécution par l’entrepreneur de son obligation de réaliser l’ouvrage contractuellement promis alors qu’elle avait relevé que le constat contradictoire de l’état de la qualité des travaux ne constituait pas un procès-verbal de réception de ceux-ci. »
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