L’arrêt ci-dessous référencé, bien que non publié au Bulletin, mérite l’intérêt des praticiens en ce qu’il rappelle deux solutions acquises et en énonce une selon nous inédite en matière d’indemnisation des troubles anormaux de voisinage consécutifs à la réalisation de travaux.
En l’espèce, une société propriétaire d’un hôtel voisin d’un chantier demandait l’indemnisation des pertes de chiffre d’affaire qu’ils estimaient consécutives à la réalisation d’un important ensemble immobilier, le chantier ayant duré quatre ans.
L’arrêt énonce trois solutions :
– la Cour de cassation confirme d’abord l’arrêt d’appel qui avait admis l’indemnisation du tiers voisin victime. L’intérêt de la longue motivation est de souligner l’importance du lien de causalité entre le dommage invoqué par le voisin (perte de CA) et le trouble (chantier) ;
– elle censure en revanche l’arrêt de la Cour de Paris sur la question du partage de la charge définitive entre coobligés rappelant les règles issues de l’arrêt Georges V-II (Cass. 3e civ., 26 avr. 2006, n° 05-10100 : Bull. civ. III, n° 100 ; RGDA 2006, p. 696, note J.-P. Karila ; D. 2006, p. 2504, note J.-P. Karila) et d’un arrêt du 20 décembre 2006 (Cass. 3e civ., 20 déc. 2006, n° 05-10855, Bull. Civ. 2006, III, n° 254 ; RDI 2007, p. 145, obs. E. Gavin-Oosterlynck ; RCA 04/2007, n° 117, obs. H. Groutel) savoir : » que dans l’exercice de l’action du maître d’ouvrage ou de son assureur au titre du trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage, la contribution à la dette, en l’absence de faute, se répartit à parts égales entre les co-obligés » ;
– l’intérêt pratique le plus important concerne cependant le troisième point savoir la garantie due par les assureurs de responsabilité civile du sous-traitant chargé du gros oeuvre.
S’étaient en effet succédés pendant la durée du chantier deux assureurs : le premier couvrant la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1994 ; le second couvrant la période du 1er janvier 1995 au 20 mai 1996.
Comment devait se répartir la charge du sinistre s’agissant d’un trouble anormal de voisinage, fait continu à cheval sur les deux périodes de garantie
Confirmant sur ce point l’arrêt de la Cour de Paris, la Cour de cassation a estimé que le fait générateur du dommage était constitué par le commencement des travaux de sorte que, le commencement des travaux étant intervenu pendant la validité de la première police, seul le premier assureur était tenu à garantie et ce pour une durée égale à celle de la responsabilité de son assuré.
Source : Cass. 2ème civ., 10 juillet 2008, n° 07-13955