Ancien ID : 244
Présentation généraleSuite à amendement du sénateur Mercier en première lecture de la loi rectificative de la loi de finance 2006, le Sénat en première lecture a adopté un article 39 bis prévoyant l’insertion d’un nouvel article L. 243-9 dans le Code des assurances.
La Commission mixte paritaire a adopté ce texte qui a été voté en termes identiques par l’Assemblée Nationale et le Sénat le 21 décembre 2006.
La loi a été publiée au Journal officiel du 31 décembre 2006 (Loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006).
Son article 145 insère dans le Code des assurances un article L. 243-9 ainsi rédigé:
« Art. L. 243-9. Les contrats d’assurance souscrits par les personnes assujetties à l’obligation d’assurance de responsabilité en vertu du présent titre peuvent, pour des travaux de construction destinés à un usage autre que l’habitation, comporter des plafonds de garantie.
« Un décret en Conseil d’Etat fixe les conditions dans lesquelles les montants de garantie peuvent être plafonnés, en fonction notamment du montant des ouvrages, de leur nature ou de leur destination, de la qualité du maître d’ouvrage et du constructeur et, le cas échéant, du niveau de la couverture d’assurance des différents intervenants à une même construction. »
Brève analyse
Remarque liminaire : Les observations qui suivent ne prétendent pas à l’exhaustivité et seront, en tout état de cause, éclairées / amendées par le décret d’application de ce texte et par l’interprétation que la jurisprudence adoptera à terme.
Première observation – champ d’application
Le champ d’application de ce texte est problématique.
Deux éléments sont à prendre en considération :
– la lettre du texte qui énonce que sont concernés « les contrats d’assurance souscrits par les personnes assujetties à l’obligation d’assurance de responsabilité en vertu du présent titre »
– la numérotation de l’article (L. 243-9) et sa situation dans le Code des assurances savoir dans le Titre IV (L’assurance de travaux de construction), chapitre III (Dispositions communes).
Deux interprétations sont possibles :
– première interprétation : seule l’assurance de responsabilité décennale obligatoire est concernée par le texte.
– seconde interprétation : les assurances de responsabilité décennale et dommages ouvrage obligatoires sont concernées.
Un argument milite contre la première analyse : pourquoi placer dans le chapitre III (Dispositions communes) un texte qui n’a vocation à s’appliquer qu’à l’assurance de responsabilité obligatoire. Si telle avait été la volonté du législateur, il aurait fallu intégrer cette disposition dans la Chapitre Ier (L’assurance de responsabilité obligatoire).
Inversement, cet argument est en faveur d’une application pour les assurances de responsabilité décennale comme pour l’assurance dommages ouvrage.
Reste que la lettre du texte retient que seuls les contrats souscrits par les personnes soumises à une obligation d’assurance de responsabilité en vertu du présent titre sont concernés.
Il en découlerait que les contrats souscrits par les maîtres de l’ouvrage (qui ne sont pas soumis à la souscription d’un contrat d’assurance de responsabilité mais de dommages)ne seraient pas concernés, sauf à construire aux fins de cession.
Une voix médiane permettant de faire cohabiter la lettre du texte et sa situation dans le code serait de retenir que sont concernés tous les contrats (assurances de responsabilité décennale et dommages ouvrage) dès lors qu’ils sont souscrits par les constructeurs et assimilés.
Cette interprétation n’aurait cependant pas de sens en pratique. On ne saurait à notre sens faire dépendre la stipulation de plafond de la qualité de la personne ayant souscrit ladite assurance.
En conclusion sur cette question :
– il est certain que ce texte a vocation à s’appliquer à l’assurance de responsabilité décennale ;
– l’application de ce texte à l’assurance dommages ouvrage reste incertaine même si la présence du texte au sein du chapitre relatif aux dispositions communes aux assurance de responsabilité décennale et dommages ouvrage milite pour son application aux deux types de contrat.
En tout état de cause, le décret d’application viendra éclairer cette question, étant observé que les plafonds de garantie en assurance dommages ouvrage ne sont pas illicites mais limités au coût de la construction revalorisée.
La question qui se posera donc éventuellement sera celle de savoir si sera applicable le plafond limité au coût de la construction revalorisée comme c’est le cas aujourd’hui, ou au plafond tel qu’il serait défini contractuellement différement au contrat d’assurance.
Deuxième observation – portée du texte
Ce texte a pour finalité d’autoriser l’insertion, dans les polices dommages ouvrage et de responsabilité décennale, de clauses de plafond de garantie.
Ces clauses ne pourront cependant être stipulée que pour les « travaux de construction destinés à un usage autre que l’habitation« .
Troisième observation – renvoi au pouvoir réglementaire le soin de réglementer ces clauses
Le texte se limite à autoriser, pour les travaux de construction précitées, la stipulation de plafonds de garantie.
Il renvoie, pour la définition des modalités précises de ces plafonds, à un décret en Conseil d’état qui devra réglementer les conditions dans lesquelles les montants de garantie peuvent être plafonnés, en fonction notamment :
– du montant des ouvrages,
– de leur nature ou de leur destination,
– de la qualité du maître d’ouvrage et du constructeur
– et, le cas échéant, du niveau de la couverture d’assurance des différents intervenants à une même construction.
Quatrième et dernière remarque – Entrée en vigueur du texte
Ce texte n’a, en l’état actuel, aucune portée juridique bien qu’il ait été publié au Journal officiel.
Seule l’intervention du Décret en Conseil d’état permettra son entrée effective en vigueur.
© Karila – Cyrille Charbonneau & Laurent Karila